Au moins maintenant, il faisait jour, et étrangement, il avait moins peur, comme si l'aube avait quelque chose d'apaisant. IL ferma les yeux pour dormir, il pouvait à présent. Mais une fois de plus, il ne dormit pas longtemps, il n'y arrivait pas. Alors, il se leva, raccrocha son sabre sur son dos, rangea ce petit carnet. Il grelottait, avait la chair de poule, et l'impression d'avoir un gouffre béant à la place du ventre, et l'arrière goût du vomi venait le rendre plus malade encore. Il ne savait pas combien de temps il allait encore pouvoir tenir dans cet état, mais marcher et respirer lui ferait du bien.
Alors il se mit à déambuler sur le pont, se tenant aux bords pour ne pas chanceler, ne s'en approchant tout de même pas trop pour ne pas passer par-dessus bord, c'eût été bête. Il se contenta de faire un tour discret pour finalement se recroqueviller à nouveau à l'endroit qu'il s'était attribué pour la nuit, et n'arrivant pas à se rechauffer, se frictionnant les bras en vain, il se remit alors à dessiner, pour arrêter de penser qu'il avait froid, faim, qu'il allait mal. Il s'appliqua sur ses fleurs si bien que ses yeux se fatiguèrent, mais il continuait quand même...epuisé...il sentait qu'il dormirait bientot, le sommeil, qui viendrait peu à peu...mais quand? Il ne mit pas longtemps, mais à nouveau cela ne dura pas, et il se réveilla.
Il venait de rêver de Keyran, un rêve qui n'avait pas duré. Il lui avait souri, lui avait dit qu'il avait bien agi, et au moment où il approchait pour le serrer dans ses bras et lui embrasser le front comme de son vivant il en avait l'habitude, l'enfant s'était réveillé. Réveillé alors qu'il rêvait d'un moment heureux, cela ne fit qu'accroître son sentiment de solitude. Il était un peu moins mal que tout à l'heure, mais il n'osait pas bouger, de peur de se sentir à nouveau faillir. Il se dit qu'il attendrait que quelqu'un vînt lui dire quoi faire, puisque le fait qu'il ne pût pas parler et qu'il était trop mal pour écrire l'empêchait d'aller engager une conversation.
Manger. Il lui fallait manger. Mais où? comment? Quoi? Il eût été aisé de demander à un marin, mais ceux-ci n'inspiraient pas trop confiance à Waku, et ils avaient l'air occupé, il n'osait pas déranger, et de toutes façons, on l'a déjà dit, il était trop mal pour écrire, non c'est non. De plus, ce n'était pas dans son habitude de demander les choses aux gens. Il se contentait de ce qu'il avait.
Il fouilla dans son sac. Il avait encore un crouton. Tant mieux. Ce n'était pas grand chose, mais manger beaucoup eût de toutes façons été inutile, car il sentait que la journée allait s'annoncer toute aussi pénible que la première pour son estomac.
Il mangea son crouton, donc, s'abimant les dents dessus mais finissant par le terminer, et se sentit un peu mieux, il n'avait plus l'impression qu'il flancherait au moindre mouvement trop brusque qu'il faisait. il avait faim sans avoir envie de manger. Et toujours cet affreux goût d'ancien vomi, amer et brûlant la gorge. Un bonbon...pourquoi n'avait-il pas emmené de bonbons? Il y en avait pourtant tellement chez lui, à la maison. Qu'il était idiot... ça lui aurait en plus fait du sucre sans grand chose à vomir au cas où...mais tant pis...il allait devoir se contenter de rester assis là à attendre une occasion pas trop pénible de se rendre utile.
Une fois son crouton mangé, il se remit à dessiner. Sur les pétales de ses fleurs, il s'amusa à redessiner les gravures sur son épée, quelque chose d'étrange qu'il n'avait jusque là pas encore reussi à déchiffrer. Peut-être après tout n'était-ce là que pour faire joli, bien que connaissant Keyran il était persuadé que cela signifiait quelque chose. C'était un cadeau qu'il lui avait fait, il avait sûrement dû l'acheter...mais à y repenser...le sabre ressemblait étrangement à celui dont il était question dans les histoires d'Akeraï... Akeraï...Keyran... il l'aimait tant... Pas comme on aime, enfin, pas comme Kenji aimait Nagao, ou comme Waku aimait sa mère, ou comme soi fon aimait genzo (ok je sors pas taper, mais j'ai envie d'embêter mon monde ce soir , bourrage de gueule post-bac oblige

A voir un adulte prendre un enfant qui n'est pas le sien ainsi dans ses bras, l'embrasser comme il le faisait, et le caliner comme il le faisait, dans un endroit comme un square, n'importe qui aurait pu s'imaginer des choses. Pourtant il n'y avait rien d'autre qu'une pure affection là-dedans, et tout cela n'allait pas plus loin... leur relation était ...indéfinissable et incompréhensible de quiconque ne l'avait jamais vécue. A la fois simple, et en même temps intime et profonde....ambigüe...
Et au fur et à mesure qu'il dessinait, il remontait dans ses souvenirs, non, Keyran ne pouvait pas avoir disparu tout simplement comme ça...il avait été executé...il l'avait...non il ne l'avait pas vu justement, il l'avait appris par le journal. Et il n'y croyait toujours pas, il ne s'en remettait pas et ne le ferait probablement sans doute jamais. Et parce que tel était le souhait de Keyran, Waku s'était inscrit dans cette redoutable armée qu'était l'armée shinobi, parce qu'il aimait son village et que pour lui l'honneur de Kiri était, la propagande de keyran n'etait sans doute pas pour rien là-dedans, l'une des choses les plus importantes à ses yeux.
Et maintenant, il avait perdu celui pour qui il faisait tout ça, mais parce qu'il faisait cela pour quelqu'un qu'il avait perdu, il s'était également séparé-sans doute à jamais - de ceux qui lui restaient. Il souriait, oh oui, waku souriait toujours, il était gentil mais souvent on assimile les gentils aux niais - ce n'était peut-être pas totalement faux, mais il était loin d'être stupide - mais au fond de lui, sa douleur était grande. Seulement, elle ne regardait personne, il était là parce qu'il l'avait voulu, et il l'avait voulu parce que c'était ce que Keyran voulait, et ses parents avaient été totalement d'accord parce que cela arrangeait tout le monde ainsi. Il n'avait donc rien à se reprocher. Oui mais voilà , il s'était passé quelque chose d'imprévu, qui n'aurait pas dû être, que Keyran n'eût surement pas voulu, qu'il n'avait donc pas voulu non plus, et qui n'arrangeait pas ses parents parce que le fait que leur fils devînt un traître allait sans aucun doute nuire à leur réputation, et donc, il culpabilisait, et il avait le mal de mer, et il voulait rentrer, et il était triste, et il était seul, et il ne savait pas trop ce qu'il allait devenir, et il avait sommeil, mais il avait peur de dormir, et il avait faim, mais il avait peur de manger, et il se sentait mal, et il avait peur de faillir, et de mourir ici, sur un bateau inconnu sur lequel il n'avait jamais prévu d'aller, avec des gens qu'il ne connaissait pas, certains qu'il appréciait, comme Kenji, et d'autres qui l'effrayaient, comme Soi Fon.
Et donc voilà le pauv' Waku posé sur une planche un carnet sur les genoux à se souvenir lamentablement du passé se sentant coupable de regretter un temps désormais révolu, n'ayant plus d'autre espoir qu'une cause perdue d'un jour faire l'honneur de Kiri en sauvant le village d'ennemis qu'ils avaient plus de chance d'être que ceux qu'ils chassaient, fuyant pour cela dans un endroit qu'il ne connaissait pas mais qui pour être loin ne pouvait qu'être climatiquement très différent de Kiri, lui qui n'avait l'habitude que de la petite île sur laquelle il vivait hormis un ou deux voyages en bateau qui s'étaient mal passés .
Mais Waku n'était pas du genre à s'apitoyer sur son sort, alors il fixait l'horizon selon les conseils de Nagao, du moins ce qu'il en voyait puisqu'il était assis parterre, son habituel sourire qui se voulait plein d'espoir sur le visage, prenant ce que le destin lui donnait - car de toutes façons il n'avait pas le choix, alors s'il se sentait mal, physiquement ou moralement, qu'importait, autant fermer sa gueule pour éviter d'ennuyer les autres avec des histoires de gamin qui n'interessaient sûrement personne parce que, chacun sa merde, comme disait l'expression.
Et donc, pour s'occuper, tenter de ne pas penser lui-même à son malaise, il dessinait, pour passer le temps, des fleurs, sur lesquelles il recopiait les gravures qui se trouvaient sur le sabre que.... mais là...y a comme une répétition.
Remarquez, c'était un peu ça, l'esprit de Waku à ce moment précis. Une répétition. Ses pensées étaient claires nettes et précises et se répétaient dans sa tête, il savait où il en était, mais le problème était que là où il en était, justement, il n'avait pas envie d'y être. Seulement, lorsqu'on est shinobi, on n'est pas à l'école des bisounours, et ça, Waku en était parfaitement conscient, et il en avait été parfaitement conscient au moment de s'inscrire, il savait depuis le début dans quoi il s'était engagé. Alors il s'adaptait, et ne disait rien - comme s'il en avait été capable, en fait - parce qu'il n'avait rien a dire, puis peut-être aussi un peu parce qu'il ne pouvait pas. Bref.
Un gosse de treize ans qui repart de zéro. Et qui commençait sa nouvelle vie en tuant un inconnu, se faisant d'un côté frapper pour avoir obéi, et d'un autre se faisant dire qu'il avait "bien agi" pour avoir fait pire que celle qui ne l'avait que frappé, c'était à n'y rien comprendre et...mais l'histoire, vous la connaissez déjà, et sinon, lisez tous les posts précédents depuis le début, y sont bien en plus

Alors pourquoi tant de lignes, pour ne faire que résumer quelque chose qui s'est déjà passé, encore et encore? Pour ceux qui ne l'auraient pas compris, mais vous êtes intelligents, donc en fait ce sont ces deux-lignes ci qui sont inutiles, tout se répète, encore et encore, parce que c'est comme cela que le voit Waku, et que le but est de rp son personnage. Mais comme il ne fait rien parce que...enfin vous n'avez qu'à tout relire pour savoir pourquoi il ne fait rien, et bien il pense. Et comme il pense, et bien le but est de décrire ses pensées et ses sentiments, et comme tout se répete, et bien ici aussi.
Alors peut-être que c'est ennuyeux: et bien rassurez-vous, ça l'est tout autant pour Waku. Mais mal en point qu'il est, notre brave bonhomme a bien conscience qu'aider un marin ne ferait que retarder ce dernier, et aider risquerait tout simplement de le faire tomber dans les pommes parce qu'il était mal, qu'il avait à peine mangé, qu'il n'avait pas beaucoup dormi et qu'il était transi de froid et d'humidité de la brume parce qu'il avait passé la nuit dehors, et ça, ça aurait sûrement ennuyé tout le monde, enfin, à vrai dire personne n'en aurait sûrment rien eu à faire, mais lui, lui avait toujours peur s'il s'évanouissait de ne jamais se réveiller, il préférait donc ne pas essayer. Bien que d'un côté cela eût fait passer la traversée plus vite. Mais non, il ne voulait pas tenter le diable. Il espérait juste qu'on lui pardonnerait de ne pas se montrer très utile. Il était prêt à tout pour Kiri, aller décrocher la lune, éteindre les étoiles et dépeindre l'arc-en-ciel qui vient entre la pluie et le beau temps, mais pas sur un bateau.
Alors pour s'occuper, il pensait donc les mêmes choses encore et toujours -il faut dire qu'à part Keyran qui lui manquait il n'avait pas, une fois le tour des récents evenements fait, grand chose à penser - et il dessinait aussi, toujours les mêmes fleurs sur la même feuille,il repassait les mêmes traits, cherchant à les rendre "vivantes", et au fur et à mesure y ajoutait des ombres et des décorations sur les pétales, si bien que cela commençait à mesure que le temps passait, plus à ressembler à un mandalla complexe et bizarroide sans queue ni tête et pourtant avec une étrange régularité qu'à des fleurs.
Enfin, il dessinait par phases: il prenait son crayon, le posait sur la feuille, dessinait un peu, était pris de nausée, s'arrêtait quelque temps pour respirer, fermer les yeux,fixer l'horizon le temps de calmer son mal, et recommençait...il avait sommeil, mais il avait peur de dormir, et il avait faim, mais il ... etc, etc, etc.